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Orignal pour homme seulement

Orignal pour homme seulement

16 septembre 2024

Mario Huot

Ce titre évoque une expression populaire pour nous faire comprendre que la technique de chasse que je vous propose est pour ceux ou celles qui veulent récolter un gros mâle mature avec un panache impressionnant. Avant de commencer il est important de bien comprendre toutes les périodes d’ovulation de la femelle. Pas deux, pas trois, mais quatre périodes d’ovulation pour un cycle annuel de la femelle orignal. Nous savons tous que la période de gros call se situe environ à la troisième semaine de septembre, 21 jours plus tard le deuxième call, soit vers le15 octobre.

Donc, pour bien comprendre, durant la première et la quatrième période d’ovulation, les femelles ne sont pas fécondables, mais ces moments sont bien importants dans le cycle naturel de la vie qui indique un début et une fin. Il n'est pas rare de voir des mâles essayer d’accoupler des femelles en novembre, la quatrième période non fécondable. Mais c’est vraisemblablement pendant la deuxième et la troisième période d’ovulation qu’il peut y avoir conception et c’est ce qui nous indique le « pic »du rut.e premier litre d’urine est versé partout autour de moi et le deuxième est déjà prêt si une réponse se fait entendre. Après une séance d’appels de plus de quatre heures, pas la moindre réponse et sans même percevoir un écureuil, ce petit animal qui fait autant de bruit qu’un éléphant en forêt. Encore 45 minutes avant l’heure légale. Le jeune mâle de 2 1/2 ans fait son apparition devant moi, à plus de 1000 mètres. Il avance vers moi, craintif, en ne faisant aucune vocalise. Il avance à pas de souris, tout en regardant souvent derrière lui. Même à cette distance, il me cherche, il abesoin du deuxième sens pour serassurer, le premier étant le son d’une femelle en chaleur et le second l’odeur. Ma deuxième bouteille d’urine d’un litre est sur le point de se vider partout. Mais

La préparation

Une bonne analyse de territoire est primordiale pour utiliser cette technique de chasse qui est hors du commun. J’utilise plusieurs caméras de détection que je dispose à divers endroits dans mon territoire de chasse et quelques-unes tout particulièrement à messalines. Les salines offrent aux géants de nos forêts tous les nutriments et minéraux essentiels à une bonne pousse des bois, en plus de leur offrir les éléments que la nature est moins encline à leur donner.

Ces ronds-points ambulatoires odoriférants et salins à souhait sont parfaits pour attirer les femelles durant l’été, car dans leurs habitudes, les femelles sont moins portées à se déplacer. Elles adorent trouver un endroit de nourriture abondante, qui leur offre aussi un environnement sécuritaire pour leurs petits ou pour elles-mêmes. Tandis que le mâle, un peu plus vagabond, aime bien errer ici et là, surtout durant l’été. Donc, si vous avez plusieurs femelles et petits dans vos salines durant l’été, soyez heureux. Au contraire, les photos de mâles nous indiquent le potentiel qu’il pourrait y avoir à l’automne, mais sans des photos de femelles, dites vous que ces beaux mâles disparaîtront à la recherche de leurs belles dulcinées.

Première de septembre

Mes derniers déplacements se font deux ou trois semaines avant la période de chasse. À cette date, tout est en place pour bien comprendre le scénario qui se dessine et mes caméras sont mes yeux. Mes cartes mémoire retirées, changées et bien identifiées pour une analyse minutieuse me dévoileront tous leurs secrets. Je dois comprendre le nombre d’individus différents présents ainsi que leur sexe. Je dois savoir si une routine s’est installée, ou une route qui m’indique par où la bête passe et à quelle fréquence. Tous les signes de frottages, souilles, grattages et traces au sol me donnent tout ce dont j’ai besoin pour comprendre qui vit dans mon fief.

Une carte de mon territoire est essentielle à bien comprendre ce qui se joue en temps réel. Je mets des points indiquant les traces, les sentiers, tous les signes même les plus insignifiants soient ils. Un portrait global, en plus de toutes les photos datées, me disent que j’ai un gros mâle mature irrégulier, un petit mâle régulier de 1 1/2 an, un petit mâle irrégulier de 2 1/2 ans et quatre femelles différentes avec trois veaux. Ma carte se dessine de plus en plus, tout devient clair, les sentiers se croisent, les frottages se dirigent dans le même sens, les salines sont des points déraillement. Je suis prêt, mais tout ça est un film qui joue, sans oublier que je ne suis qu’un figurant. Je contrôle seulement ce que je sais, mais l’important est de bien connaître son rôle et son texte (appels).

La chasse

Un matin parfait, François, mon caméraman et moi commençons à faire tranquillement le tour de tous les chemins praticables que nous avons. Nous visitons les trois salines pour récupérer les cartes mémoire des caméras de détection. Toutes ces étapes dans une lenteur voulue, en prenant soin de faire attention à nos odeurs.

Les urines

Tous nos déplacements se font avec de l’urine de jument en chaleur.
Stratégiquement, nous aspergeons les sentiers de salines, les ronds-points où les chemins principaux des orignaux se croisent. Une façon parfaite pour camoufler nos odeurs, en plus de créer des murs d’odeurs incroyables dans le territoire pour éveiller tous les sens du mâle convoité. L’avant-midi se termine et c’est le visionnement de nos caméras de détection qui ont travaillé fort pour nous. Nous devons faire un plan pour cet après-midi. Et une bonne préparation peut augmenter nos chances de récolter notre gros mâle.

Le vent

Les détails recueillis nous indiquent quel serait l’endroit idéal, mais le vent du sud élimine à coup sûr ce site. Impossible d’arriver sans bruit et sans se faire repérer par notre odeur dégagée. Il est donc mieux de sacrifier notre après-midi à cet endroit spécifique au lieu de faire fuir les animaux que nous avons étudiés et convoités depuis tant de temps. Plan B, un bûché surplombant une forêt mature de feuillus. Plusieurs arbustes mangés et quelques signes nous indiquant une belle concentration d’orignaux. L’équipe est prête, nous apportons le minimum d’équipement pour assurer des déplacements selon les circonstances, car vu de loin, un bûché semble toujours facile à s’y déplacer, mais sur place les surprises peuvent se succéder.

L’appel

Mon partenaire de chasse se place sur un petit monticule d’arbres entassés par la machinerie, ce qui lui donne une belle vision du buché situé à l’est pour plus de 600 mètres de distance. Appuyé sur son bâton de tir, à travers les arbustes et arbres morts, ses points d’appui de son arme semblent parfaits. De mon côté, je m’éloigne de plus de 200 mètres pour avoir la vue sur toute la partie ouest, avec une ouverture vraiment plus grande pour une distance de plus de 1000 mètres. Une assez bonne distance, mais si notre mâle répond à mes sons langoureux, le tir ne se fera pas au-delà de 40 mètres.

Le premier litre d’urine est versé partout autour de moi et le deuxième est déjà prêt si une réponse se fait entendre. Après une séance d’appels de plus de quatre heures, pas la moindre réponse et sans même percevoir un écureuil, ce petit animal qui fait autant de bruit qu’un éléphant en forêt. Encore 45 minutes avant l’heure légale. Le jeune mâle de 2 1/2 ans fait son apparition devant moi, à plus de 1000 mètres. Il avance vers moi, craintif, en ne faisant aucune vocalise. Il avance à pas de souris, tout en regardant souvent derrière lui. Même à cette distance, il me cherche, il a besoin du deuxième sens pour se rassurer, le premier étant le son d’une femelle en chaleur et le second l’odeur. Ma deuxième bouteille d’urine d’un litre est sur le point de se vider partout. Mais à ma première journée de chasse, à peine quelques minutes avant la noirceur, je suis certain qu’il sera notre atout si après quelques jours nous n’avons pas réussi à voir notre géant à palettes.

La météo

Notre première journée s’est quand même bien déroulée, un mâle qui aurait pu être dans notre assiette, mais qui a été gracié. Pour l’instant, la seule préoccupation est demain. Les trois questions à se poser avant de partir du camp sont: 1- De quel côté va le vent ?2- Si le soleil est présent, y a-t-il une endroit pour appeler dans un secteur ombragé pour ne pas me faire détecter par les reflets que peuvent faire mon visage, mes mains, mon arme, mes jumelles, etc. ? et 3- La pluie est-elle présente, car contrairement à ce que beaucoup de chasseurs peuvent penser, l’orignal n’est pas beaucoup affecté par la pluie; mais pour nous, c’est un atout parfait pour une journée de déplacement et de camouflage d’odeurs.

La journée de pluie

Eh oui, comme nous le vivons souvent à Terre-Neuve, la pluie est installée et est là pour de bon. Notre stratégie d’hier soir doit être abandonnée. Aujourd’hui, nous allons visiter les salines, sans bruit et sans odeur corporelle comme le feraient des fantômes. La saline choisie est stratégiquement parfaite pour une séance d’appel. Un monticule surélevé nous donne une vision de plus de 150 mètres et une brise légère nous assure d’une répartition de nos odeurs dans le sens opposé à la saline. Quelques heures dans chaque saline est l’idée de base élaborée.

Nous ne sommes pas arrivés à la première saline que nous apercevons un petit veau orignal en retrait de la saline; la mère n’est donc pas loin. Les précautions du départ respectées par mes comparses sont parfaites. Arrivés au monticule de détection, nous apercevons la mère et son petit. Rien ne peut être plus attractif qu’une vraie femelle qui broute les deux pieds dans notre mixture attractive.

L’appel d’une femelle en chaleur appelant le mâle ne peut être un meilleur atout dans ces circonstances. Dans les premières minutes, la femelle nous cherche, mais sans plus, elle continue sa démarche avec son petit. Ma lamentation s’amplifie à chaque minute et une seule sorte de vocalise sort de ma bouche, soit vraiment celle d’une femelle qui est dans sa période de chaleur. Cette période a une durée de 24 à 30 heures, et la répétition d’appels d’une femelle dans cette période est approximativement aux 50 secondes.

Un trio attractif

Moins de 40 minutes ont passé, le jeune mâle de 1 1/2 an fait son apparition, jeune fringant, il s’approche de la femelle et son veau qui, dans l’instant d’un moment, le repousse avec vigueur en lui faisant comprendre qu’il ne sera pas le prince charmant pour cette année.

Mon but n’étant pas de récolter ce jeune vagabond, je veux m’en servir pour faire un trio attractif: la femelle, son veau ainsi que ce jeune mâle que j’essaie de garder dans mon entourage. Mon appel de femelle en chaleur éveille tous les sens du jeune mâle. On ne sait jamais, le gros dominant sentira mes urines et/ou entendra mes complaintes. En plus des appels, avoir des appelants des plus réalistes avec ce jeune mâle, la femelle et son petit procure un scénario parfait. Ma confiance est maximale.

Les minutes s’écoulent, les heures s’écoulent, la pluie s’intensifie et le temps passe. Le jeune mâle devint de plus en plus stressé et inquiet. Il bouge, tourne en rond, s’arrête de longues minutes et passe à quelques mètres de nous en prenant soin de bien sentir l’urine que nous avons aspergée auparavant. Sa démarche n’est plus la même, il se dérobe de son but principal soit d’accoupler une femelle.

l ne reste plus que cette femelle qui, à première vue, n’est pas dans ses chaleurs et n’émet aucun son, sauf quelques appels à son petit lui disant de ne pas s’éloigner. La saline si attractive se retrouve sans animaux à nourrir. Nous commençons à penser à une soupe bien chaude, qui en quelques instants, se transforma en réalité. L’après-midi trop pluvieux pour les caméras et l’électronique fragile sera consacré à l’élaboration de stratégies pour les quelques jours restants.

Journée fraîche de soleil

Aujourd’hui, un matin semblable au jour 1,nous redoublons d’effort et de persévérance. Un autre jeune mâle s’approche sans bruit et sans émettre le moindre appel. Ce comportement est somme toute étrange, car normalement ces jeunes mâles rapides et sans crainte ne se gênent pas pour importuner les femelles, même s’ils sont repoussés parfois violemment. Un autre avant-midi qui se termine avec quelques bêtes vues mais, où est notre gros buck?

L’heure du dîner en forêt me permet de réfléchir à tout ce qui vient de se passer depuis quelques jours. Une femelle avec son jeune qui n’est pas en chaleur ,donc pas du tout attractive pour le dominant, les deux autres jeunes mâles qui tournent autour des femelles, mais qui ont une crainte de faire des sons et même de s’affirmer… Je crois que j’ai trouvé!

Le dominant

Attention: cette technique doit être pratiquée seulement quand vous êtes absolument sûr et certain que vous avez un gros mâle dominant dans votre territoire.

Notre après-midi déjà amorcé nous ramène à notre saline où se tiennent la femelle et son veau. De plus, il y a une autre femelle que nous voyons régulièrement sur nos caméras de détection et un ou deux jeunes mâles qui tournent autour des femelles. Notre plus grande densité d’animaux recherchés dans une circonférence de 800 mètres. Parfait pour sortir l’arsenal d’urine et d’appel que nous avons. Nous passons plusieurs heures à faire l’appel de la femelle en chaleur qui cherche le mâle.

Une stratégie qui a fait ses preuves est d’alterner soit en demi-journée ou en journée celui qui appelle. L’orignal possède une mémoire auditive d’environ cinq à sept jours, donc si vous vous êtes fait avoir ou vous avez créé un doute dans la tête de l’animal, soit parce qu’il vous a senti ou que vous avez fait une mauvaise sonorité ou autre, l’animal reconnaîtra cette tonalité que vous avez faite. Chaque fois le doute resurgira et l’animal fera un pas de reculons pour vous laisser bredouille avec vos interrogations. Si vous pensez que quelque chose s’est passé, changer de «calleur» pour ne pas laisser le doute planer plus longtemps dans la tête de l’orignal.

Le tout pour le tout

Depuis quelques jours, je n’ai vu aucun mâle mature dans mon environnement tout en sachant très bien qu’il est là bien peinard dans les profondeurs de la forêt. Avec l’analyse des journées passées, je réalise que mon gros buck ne réagit pas aux vocalises de femelles en chaleur, j’opte donc pour la provocation. C’est une de mes méthodes préférées pour la chasse à l’orignal à Terre-Neuve, au Yukon ou dans les réserves fauniques du Québec où la densité est assez intéressante pour simuler de la confrontation entre des mâles matures.

J’installe donc François à 30 mètres derrière moi muni d’une tige de bois franc de 7 po de diamètre et de 7 pi de longueur. De mon côté, je m’assure que j’ai une portée de son parfaite avec beaucoup de résonance et d’écho qui se répercutent dans les montagnes à quelques kilomètres de distance. Le spectacle commence, François qui fracasse de toutes ses forces la tige de bois franc sur un autre arbre, le tout sonnant comme des coups de fusil à travers la forêt. Moi, de mon coté, j’imite à la fois un mâle mature et une femelle qui dit de venir la voir. François de son côté fracasse de toutes ses forces chaque fois que je lui fais signe. Il est important de ne pas faire le son du mâle quand on joue de la palette, car il est irréel de faire deux sons en même temps, et de là vous pourriez créer un doute dans la tête de la bête.

Ma technique ultra bruyante porte fruit. Le mâle dominant n’attendait que ça, il n’avait aucun adversaire, en plus du fait que ses femelles étaient déjà accouplées ou sur le point de l’être. Monsieur «56 pouces» est prêt, il veut nous affronter. Nous ne sommes pas à armes égales, j’ai un bâton de tonnerre qui peut tirer des ogives à plus d’un kilomètre, et lui ses 450 kilogrammes et son panache extra large. Sans même avoir besoin de m’appuyer sur quoi que ce soit, je lève mon arme et dans une fraction de seconde je vise la partie vitale, immense lorsqu’on est à une distance de moins de 50 mètres.

La récolte

Le travail a été bien fait. L’analyse du territoire, la lecture de nos caméras de détection, nos salines qui gardent les femelles à proximité, tout a été parfait. En plus, prendre le temps de réfléchir, de comprendre et d’analyser le passé, le présent et d’extrapoler le futur nous donne assurément de meilleurs résultats. La preuve est encore faite. Osez prendre des risques, mais la patience est et sera toujours la clé du succès !



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