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LE PAVILLON LARRY’S GULCH DE LA RIVIÈRE RESTIGOUCHE

LE PAVILLON LARRY’S GULCH DE LA RIVIÈRE RESTIGOUCHE

19 septembre 2024

Sylvain Lessard

Qui n’a pas rêvé de pêcher le saumon de l’Atlantique
sur une rivière de renommée mondiale dont les eaux cristallines
abritent d’énormes poissons? Un tel endroit existe bel et bien

à seulement quelques heures de distance.

Depuis toujours j’adore pêcher à la mouche et j’ai capturé plusieurs espèces de poissons à l’aide de cette technique, ce qui m’a obligé à parfaire différentes approches, à utiliser différentes mouches et d’innombrables présentations. Cependant, lorsque vient le temps de parler du saumon de l’Atlantique en rivière, alors là je reste prudent. Ce poisson noble à l’histoire légendaire reste quand même difficile à prendre et peut même s’avérer très capricieux à ses heures.

J’ai bien arpenté plusieurs rivières de la Côte-Nord, ainsi que de la Gaspésie et d’Anticosti, sans vraiment connaître un succès fou. Le plus souvent, l’eau est trop basse… les saumons n’avaient pas monté… pas beaucoup de saumons cette année-là, etc. J’ai donc vécu plein de contraintes faisant de cette pêche un défi entouré de difficultés inhérentes à cette espèce. Ainsi, lorsque notre collaborateur Jacques Héroux, demeurant au Nouveau-Brunswick, m’a parlé de la possibilité d’effectuer un séjour au Pavillon Larry’s Gulch sur la rivière Restigouche, mes yeux se sont écarquillés.

 Spécialiste et excellent technicien de la pêche au saumon et de la pêche à la mouche, M. Héroux n’aurait pas pu me faire une plaisanterie sur ce haut lieu de la pêche… Car pour tout dire, la prestigieuse rivière Restigouche est de renommée mondiale. Des hommes et des femmes d’État, dignitaires, présidents, acteurs d’Hollywood et sportifs professionnels de renom ont pêché la Restigouche. Cette rivière du nord du Nouveau-Brunswick borde même le Québec sur plusieurs kilomètres avant d’aller se jeter dans la baie des Chaleurs.

 D’ailleurs la rivière Kedgwick,un affluent de la Restigouche, prend sa source au Québec à même la réserve faunique de Rimouski. Mentionnons aussi que le record de la rivière est un saumon de 57 lb (26 kg), mais plus fréquemment, des spécimens de 30 lb (15 kg)et plus ne font pas exception. C’est donc grâce aux démarches de M. Héroux avec le gouvernement du Nouveau-Brunswick que j’ai pu aller pêcher le saumon sur la mythique rivière Restigouche.

L’endroit

Situé près de la municipalité de Kedgwick, le Pavillon Larry’s Gulch est présentement géré par le gouvernement du Nouveau-Brunswick et la gestion de la pêche se fait sur un tronçon exclusif de 8 km de la rivière Restigouche. Le forfait de pêche au pavillon comprend l’hébergement pour deux nuits et quatre sorties de pêche sur la rivière, accompagné d’un guide et de son embarcation pour les trois jours de séjour au pavillon. Tous les repas, collations, lunchs et boissons non alcoolisées sont inclus.

Si jamais vous n’avez pas l’équipement approprié pour un tel séjour de pêche, les responsables sur les lieux se feront un plaisir de vous équiper adéquatement. Cette région du Nouveau-Brunswick est majoritairement francophone, ce qui est fort agréable lorsque vient le temps de communiquer avec le personnel ou de discuter stratégie de pêche avec son guide.

Le pavillon central qui sert de salle à manger et de salon de repos est ceinturé par huit chalets. D’une propreté impeccable, ce haut lieu de la pêche au saumon est un véritable joyau de l’histoire de la pêche canadienne. Au début du siècle dernier, cet endroit chargé d’histoire a vu la princesse Louise, fille de la reine Victoria, pêcher le saumon sur la rivière à même une maison flottante tirée par des chevaux, et son guide amérindien de l’époque s’appelait Larry. L’histoire raconte que Larry sauva la princesse Louise de la noyade et que celle-ci, par respect, baptisa cette section de la rivière en son nom.

Premier contact

Lors de notre arrivée en après-midi, nous sommes accueillis par un personnel courtois et attentionné, puis l’horaire de la journée est établi. Surplombant l’imposante rivière Restigouche, notre petit chalet bien équipé et douillet à souhait nous est aussitôt attribué, nous permettant de débarquer notre matériel. En fin d’après-midi, rendez-vous à la salle à manger pour recevoir les directives de notre séjour et en apprendre davantage sur l’histoire de Larry’s Gulch, tout en savourant un délicieux repas, car déjà la pêche est prévue en soirée jusqu’à 21 h.

C’est en descendant sur le bord de la rivière avec notre attirail de pêche que nous prenons connaissance de l’ampleur du forfait de pêche au saumon offert. Plusieurs grands canots motorisés de type freighter, dont les guides à bord attendent que les pêcheurs y prennent place sur des chaises confortables et adaptées à l’embarcation. Les canots se suivent alors en remontant la rivière et en s’ancrant dans différentes fosses de pêche préalablement planifiées par l’équipe de guides.

Chaque canot a sa propre fosse et le ou les clients peuvent pêcher à même l’embarcation ou à gué, selon la situation. Pour le pêcheur ayant peu d’expérience à la pêche au saumon,le guide est d’une aide très précieuse: il peut recommander un certain type de mouche, sèche ou noyée, déterminer l’endroit précis où lancer selon la présence et l’emplacement des saumons dans la fosse, ou positionner convenablement le bateau afin de faciliter les lancers par les clients.

Cette rivière est impressionnante. Une eau cristalline y coule jusqu’au prochain orage qui provoque un virement en une teinte brun café chargée de sédiments et de matière organique. Ce coup d’eau, tel que je l’ai vécu après ma première nuit, a permis aux saumons de remonter davantage la rivière et de se redistribuer dans les fosses. Ce qui est une bonne nouvelle pour les pêcheurs, car des saumons nouvellement arrivés en rivière sont souvent plus «preneurs» que ceux stationnés dans une fosse depuis quelques jours.

C’est lorsque le soleil baisse à l’horizon que le guide nous demande de plier bagage afin de revenir au pavillon. Une agréable soirée de pêche qui nous a permis de faire connaissance avec cette belle rivière chargée d’histoire. Le pavillon central devient alors le lieu de rencontre par excellence pour satisfaire la curiosité de savoir comment la pêche s’est déroulée pour les autres pêcheurs, avant qu’un somptueux goûter soit ensuite servi, incluant, entre autres, saumon fumé localement et fromages variés .Aussi un beau moment pour faire plus ample connaissance avec les autres pêcheurs venus de partout et pour discuter d’une passion commune à tous, soit la pêche au saumon.

Nous remettons ça

Il n’y a pas de pêche très tôt le matin à Larry’s Gulch et un bon déjeuner est servi au pavillon avant de partir sur la rivière. La journée est divisée en deux séances de pêche, soit une en matinée jusqu’à midi et la deuxième en fin de journée (comme lors de notre arrivée).L’après-midi est libre, ce qui n’est pas une mauvaise idée en soi. Le saumon peut se reposer des pêcheurs et le pêcheur se reposer des saumons. Ce temps libre permet de visiter la région, faire des achats à l’excellente boutique de pêche à la mouche du secteur, ou simplement se prélasser aux abords de la rivière Restigouche, tout en jasant avec les autres pêcheurs et en rêvant de capturer un de ces saumons monstres.

En ce matin, l’eau de la rivière est haute et embrouillée à cause de l’orage intense que nous avons reçu durant la soirée précédente. Notre guide de la veille, M. Rolland Truchon, nous attend dans son bateau et nous partons en direction de nouvelles fosses non encore visitées. La visibilité étant restreinte dans l’eau de la rivière, c’est beaucoup plus par l’expérience du guide que nous nous arrêtons pêcher dans des endroits prometteurs.

Savoir bien quadriller la fosse par les lancers selon la position du canot est un art que seul un guide d’expérience peut amener le pêcheur à exécuter efficacement. Surtout pour une pêche à l’aveugle, sans pouvoir voir les saumons à cause de l’eau trouble. C’est donc le festival des grosses mouches colorées (Green Machine, Green Highlander et la Savoie pour les noyées) et un assortiment de gros Bombers pour les sèches. Lorsque j’avais une tirette ou un « marsouinage »d’un saumon sur ma mouche, mon guide Rolland me recommandait de changer de mouche et de recommencer ma séquence de quadrillage de la fosse.

J’ai alterné entre les mouches noyées et sèches durant mon avant-midi, tout en ajustant mes lancers pour bien les présenter. Les saumons que j’ai échappés ou mal ferrés l’ont été quelques fois en raison de mon inexpérience, par l’effet de surprise d’avoir une attaque à un moment inattendu, mais également d’autres fois ils ont été manqués en raison de la méfiance du saumon qui venait frapper ma mouche sans la prendre.

Pas besoin de vous dire que la nervosité était à son comble, surtout sachant qu’une délégation du Québec représentant le groupe Hooké pêchait les mêmes endroits que moi quelques jours auparavant et avait fait toute une pêche. Le guide me proposa alors, pour me dégourdir, d’accoster le canot sur le rivage et de continuer à pêcher à gué. Les conditions étaient splendides en ce début du mois d’août, avec un soleil radieux et des conditions d’eau dans la rivière permettant aux saumons de se déplacer, aucun insecte piqueur autour des oreilles et de majestueux pygargues à tête blanche qui survolaient la fosse. J’étais comblé par untel environnement d’une incroyable beauté.

Des moments de grâce

La pêche à la mouche a ceci de puissant: elle permet au pêcheur de faire le vide autour de lui et de se consacrer seulement à une quête bien particulière, soit la capture et la remise à l’eau d’un poisson hors du commun. Un grand voyageur musclé qui a passé des semaines en mer à éviter les pièges et les prédateurs et qui remonte depuis la nuit des temps, une rivière propre à ses descendants, là où il est venu au monde. C’est un genre d’état de grâce qui se rapproche de la spiritualité. Pas pour rien que la pêche aux saumons pour certains est une véritable «religion». Lorsque mon guide me rappela qu’il était midi et que nous devions rentrer au pavillon, je me réveillai soudainement de cette rêvasserie passagère en souriant bêtement à la rivière et à ses occupants aquatiques. On se revoit plus tard alors…

La rencontre du midi avec les autres pêcheurs me permit d’apprendre qu’un seul petit saumon avait été capturé dans la matinée et que l’orage de la veille avait sûrement modifié la distribution des saumons dans la rivière, car le succès de pêche avait drastiquement chuté comparativement au groupe de pêcheurs précédent.

Pour cette dernière soirée, mon guide Rolland m’informa qu’il me ferait pêcher dans une des fosses les plus productives de la section de rivière réservée au pavillon. Cependant, pour rejoindre la fosse en question et pour bien quadriller de mes lancers le secteur de pêche, je me devais d’être debout dans l’eau pour que mes lancers atteignent la zone productive. La fosse suffisamment grande et l’eau passablement haute, offrait assez de place pour que je partage la fosse avec un autre canot ayant à son bord un père de famille et son jeune garçon. Chance du débutant, ou peu importe les circonstances, notre jeune pêcheur ferra un saumon à la fin de notre période de pêche, mais une forte pluie m’empêcha de prendre une photo.

Encore une fois de mon côté, quelques saumons sont venus voir ma mouche, et j’ai même été gratifié d’une bonne tirade et d’un gros bouillon, mais sans réussir à ferrer adéquatement le poisson. Mais entre vous et moi, quelle sensation! Même Rolland mon guide, témoin de la scène, n’en revenait pas que le saumon n’ait pas pris convenablement ma mouche. Beaucoup d’action en cette soirée. Quelques saumons furent capturés et remis à l’eau, ce qui remonta le moral des troupes.

Dernière journée

Un beau matin brumeux et frais, ce qui faisait contraste avec la dernière soirée. Encore sous l’adrénaline de la veille, Rolland me fit encore une fois découvrir une nouvelle fosse. Mais comme toute bonne chose aune fin, je devais quand même travailler un peu pour produire un reportage intéressant. Prises de photos, enregistrements vidéo, entrevue avec le gestionnaire des lieux, bref un bel avant-midi, mais avec peu de pêche.

La météo était splendide encore une fois. De plus, un goûter substantiel nous attendait au retour pour nous permettre de rassembler notre matériel et d’avoir quelques aliments en main pour notre chemin du retour.

En conclusion, ce fut un voyage de rêve, sur une rivière prestigieuse remplie d’histoires de pêche, que j’ai particulièrement apprécié. Évidemment, si j’avais pu réussir à leurrer un de ses saumons records, cela aurait été un «bonus» incroyable! Mais la pêche au saumon étant ce qu’elle est, je ne ressens aucune amertume et je suis très satisfait de mon voyage. J’ai vu des saumons, j’ai eu de l’action et des sensations avec cette pêche plus que technique. En ajoutant à cela un endroit magnifique, un service impeccable et des gens charmants veillant à votre bien-être, on peut affirmer que le pavillon Larry’s Gulch est et restera une destination de prestige indéniable pour l’amateur de pêche au saumon en rivière.

FICHE TECHNIQUE

Pavillon Larry’s Gulch Lodge412, chemin Quatre Milles, Boîte postale 1086Kedgwick, NB, Canada E8B 1z9Tél.: 506-284-3404Courriel: info@larrysgulch.caSite Internet: Larry's Gulch Lodge (larrysgulch.ca)/Prévoir 4 1/2 heures de route à partir de Québec ou 6 1/2 heures de Montréal ,en passant par la A85 à partir de Rivière du-Loup jusqu’à Edmundston. Continuer sur l’autoroute 2 jusqu’à Saint-Léonard et suivre la route 17 jusqu’à Kedgwick. Prévoir l’achat d’un permis de pêche au saumon de trois jours pour non-résident au coût de 60$.Literie, repas et accessoires de pêche sont fournis. Prévoir vos mouches préférées, ou vous pouvez les acheter localement à la Fly Shop locale de Kedgwick. Prévoir vos boissons, cigares et appareil photo. Le WiFi est limité, mais présent à l’auberge.



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